Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
7 octobre 2018 7 07 /10 /octobre /2018 16:19

Il y a de cette vie bien peu de choses à dire. Que je vais dire pourtant puisqu'on me le demande. Je vais te raconter, tu sauras un peu plus. Tu verras cette vie, et poussière et pénombre. Cette vie c'est la vie et qui passe et qui meurt. Je suis un vieux déjà qui a vécu trop peu. Un petit pot de confiture que je n'ouvrirai pas. Une corbeille à fruits où il n’y en eut jamais.
Tu vois petit à quoi tient une vie. Elle est passée partout comme l'eau du torrent. Elle est passé si vite. Il en reste un galet, une pomme de pin.
Et l'eau de la carafe qui attend qu'on la verse. Le verre est à côté qui attend qu'on le boive.
Et comprends-tu, petit ce que je te dis là. Je suis vieux je suis jeune, je suis tout à la fois.
J'écoute la radio sur un vieux transistor. J'envoie des cartes postales quand je suis en vacances. Il y a de l'avant, il y a du vieilli, il y a de l'immuable qui ne veut pas partir. 
Et les livres s'entassent s'accumulent et s'accrochent parfois aux murs de ma mémoire. Il y a ceux que j'oublie. Il y a ceux aussi, tout ceux qui restent à lire. Les livres n'arrêtent pas d'être sur l'étagère.
La pénombre de novembre à cinq heures du soir est un monde indistinct, dont des bouts me reviennent. De cette exposition que j'ai vue l'an dernier ou bien celui d'avant, il me reste cette carte, que parfois je regarde. Je n'ai pas oublié ce que je ressentais dans les galeries douces. Novembre me le rappelle de tout son crépuscule.
Regarde petit, regarde ce que la vie m'a fait. Les feuilles de la plante tombent et sèchent sur le sol. Il faut les ramasser. Regarde-les petits. Sur un chevalet miniature il n'y a rien à voir. J'ai oublié ce qu'il y avait dessus. Il reste posé là, à ne supporter rien.
C'est joli cette vie, finalement, petit. Tu n'y as rien compris, mais dis-moi, que crois-tu ? Je ne sais rien non plus mais je fais comme si.
Une boîte d’aspirine.
J'ai mal à la tête et il fait nuit, je vois.

Partager cet article
Repost0
Published by herveig
13 mai 2018 7 13 /05 /mai /2018 20:50

Dans l'espoir qu'un jour vous me verrez peut-être, vous me trouverez là. Vous viendrez me chercher et vous m'emmènerez. Ou je serai parti et vous viendrez en vain. Et serai loin déjà quand vous arriverez.

Ainsi parlait le vieux fou de la plage, personne ne l'écoutait. Il avait peur de tout il fuyait à vous voir, à vous apercevoir. Il n'était pas question de lui parler jamais. Et tout ce qu'il disait personne ne l'entendait.

Le vieux fou de la plage était-il vraiment vieux ? Il fuyait le vieux fou, on ne le voyait jamais. Alors était-il vieux on ne le savait pas. Le vieux fou de la plage était une expression dont on usait parfois comme sans y penser.

Le vieux fou de la plage n'était pas fou non plus ou pas complètement ou pas plus que nous tous. Le vieux fou de la plage avait dans ses idées les mêmes évasions que nous avions sans doute. On ne le savait pas on ne lui parlait pas on ne le voyait pas le vieux fou de la plage.

Et la plage était-elle celle que l'on croyait ? La plage du vieux fou quelle mer bordait-elle ? On entendait la mer ou on pensait l'entendre quand le vent sur la lande consentait à se taire. C'était ténu mais il y avait peut-être comme le crachat des vagues qu'on croyait distinguer. Et le vent reprenait on oubliait la mer. Et la lande était morne, on s'ennuyait si bien.

La bouteille qu’il a trouvée sur l'estran porte le nom de ceux qui recherchent l'amour. C'est un petit message qui recherche l'amour et que lit le vieux fou. C'est la première fois qu'il reçoit un message. Il n’est ni vieux ni fou et reçoit un message, un message perdu échoué sur l'estran.

Cette histoire est-elle vraie du vieux fou sur la plage ? Ou bien l’ai-je entendue dans la lande et le vent. Les herbes sont couchées que le vent martyrise. Et les herbes et le vent comme seul horizon.

 

Partager cet article
Repost0
Published by herveig
21 avril 2018 6 21 /04 /avril /2018 12:27

Dans votre esprit imaginaire les choses n'avaient pas tellement changé. Vous étiez là où vous arriviez souvent, où vous arriviez toujours. Je ne vous tenais pas la main et marchais derrière vous. Vous étiez sur cette place nue, sur cette place immense ; je n'avais rien à faire il n'y avait rien à voir. Vous répétiez un texte que vous aviez écrit, vous reviviez une vie que vous aviez vécue.

Il me fallait oser vous dire quelque chose. Mais je savais pourtant que mieux, bien mieux que moi, vous voyiez sans rien voir votre désert rêvé.

Nous étions sur la place qui n'avait pas de fin, dans cette ville plane aux avenues si longues. Cette ville grouillait, il n'y avait personne. Je vous l'expliquais mal, vous saviez mieux que moi. Le ciel n'était ni bleu, le ciel n'était ni gris. De ce blanc écrasant qui ne fait pas de bruit. Vous avanciez si vite, je vous suivais si mal. Vous ne pouviez pas voir, vous aviez déjà vu. Les façades de pierre que nous longions sans fin. Les hauts murs aveugles de musées mystérieux visités par des ombres. Vous saviez mieux que moi les grands couloirs sombres, les hautes salles obscures de ces musées sans nom. Nous n’y entrions pas vous vouliez que je dise, moi qui n'avais pas vu à vous qui saviez tout.

Ma tâche était ardue je ne savais que dire. Ma tâche était facile je n'avais qu'à parler. En silences allongés je vous faisais comprendre votre ville éternelle, votre désert lent. Avions-nous progressé et avions-nous seulement quitté la place morne ? Quel train était venu nous abandonner là ? Dans quelle cathédrale nous avait-il laissés ? Vaine gare de pierre, de fer et de vapeur aux trains se déversant de petits hommes en noir, aux longs  trains immobiles qui ne partaient jamais. Grande gare affairée et qui n'existait pas.

Je vous suivais encore. Vous n'aviez pas besoin de moi pour sentir l'océan. On ne le voyait pas, ne le voyait jamais. Vous vouliez encore que j'en parle pourtant. Encore une fois ici vous voyiez mieux que moi. Peut-être timidement pouvais-je vous parler de ce jeune marin adossé à un mur en attendant la mer.

Partager cet article
Repost0
Published by herveig
11 novembre 2017 6 11 /11 /novembre /2017 18:42

J'avais oublié combien les aventures vont loin. La vie m’avait happé j'avais cessé d’errer. Je ne me souvenais plus de mes ailleurs déments. J'étais un âne prudent et je ne bougeais pas. Peut-être que j'avais peur des monstres de mes nuits. Je me ratatinais dans l'ici et le sûr.

Ô j'avais oublié les plaines infinies, peuplées de mes angoisses, ceintes de ces montagnes, et grises et noires et vertes, qui hantaient l'enfant-moi.

Et j'avais retenu mon cerveau qui bouillonne. J'avais fait taire en moi le fou, l’immaîtrisé. Enveloppé de prudence, abruti de il-fauts.

Et je marchais perdu les deux pieds dans le gris. J'étais un petit homme qu'on ne remarque pas. J'étais ce que je suis mais j'étais mort et pâle.

Je n'avais pas compris l'ampleur de mes mirages. Mes déserts habités je les avais trahis. Ces petits hommes noirs qui grouillaient dans le sable où étaient-ils passés ?

Et marchant dans la rue grise et molle de novembre, je les ai retrouvés. J'ai revu mes folies et mes mondes s'ouvrirent. Et j'étais seul au monde dans novembre qui pleut.

Les folies magnifiques et les folies furieuses. Et les folles vertus et les vices impérieux. Revenaient à mes sens.

Mes déserts enfuis m’étaient reproposés. Lascif, abasourdi, je les avais repris.

Partager cet article
Repost0
Published by herveig
4 novembre 2017 6 04 /11 /novembre /2017 18:01

Redemande-moi ce qu'un sous-bois

M'a dit un jour.

Je te répèterai le silence des talus

Tu ne me croiras pas

Toi que la ville, toi que le bruit

Enivrent

Je m'amuserai à me taire

Alors d'autre manière

Te convaincrai

 

Partager cet article
Repost0
Published by herveig
19 mars 2017 7 19 /03 /mars /2017 18:48

Je reviens sur mes pas. Je me souviens de tout. Du fond de ma mémoire, j’extirpe quand je veux les jours envolés. Il pleut un peu. Je me nourris à évoquer les heures, à évoquer les gens. Les gens qui vinrent ici, les gens qui furent jeunes qui vécurent qui vieillirent. Je me repais de leurs existences. Je les mélange et les confonds. Tel qui fut jeune ici, je le revois s'élancer vigoureux par la porte de la cuisine sombre dans la lumière crue d'un matin frais de Pâques. C'est le même ou un autre que j'aperçois vieilli dans le petit salon. Assis dans le fauteuil, le dos à la fenêtre, il ne voit pas l'automne derrière les carreaux jaunir le tilleul.

Je reviens sur mes pas et je reste le même. Je me tais, et ne parle qu'à moi en un muet discours. La pluie cesse à l'heure du thé. Au soir de mai le soleil est encore haut. Le soir mouillé sera paisible et clair. L'arc-en-ciel a déjà disparu. Ce même soir, les trois vieilles dames qui doucement s'apprêtent pour le thé dans la bibliothèque, elles l’ont vécu déjà dans le même mois de mai. D'une autre décennie, d'un autre siècle peut-être.

Ces dames qui d'un pas lent s'avancent en parlant bas vers le vieux guéridon et les tasses fragiles, elles coururent un jour à en perdre le souffle à la fin de l'enfance. Dans le même jardin, juste à temps pour le thé.

Et le tilleul verdit sur ces vies qui commencent, sur ces vies qui s'achèvent. La fenêtre est ouverte à la bibliothèque.

 

 

Partager cet article
Repost0
Published by herveig
23 octobre 2016 7 23 /10 /octobre /2016 18:57

Un lampadaire

Ou réverbère

Un escalier

Une rampe

Et Paris

En bas

 

Les deux amoureux

Sur un banc

Le réverbère éclaire

Leur ennui heureux

La nuit possède

Paris et eux

 

Les incessants papillons volent

Infatigables autour du réverbère

Obsessionnels ils le percutent

Et ils y entrent

Et ils y meurent

Ballet stupide à Paris

 

Impassible tu fends la nuit

En haut de l'escalier

Et les amoureux sont partis

Ta lueur n'éclaire rien

Qu’un bout de pavé

Isolé absurde réverbère de Paris

 

La nuit sans nuit est constellée

Points blancs points jaunes vigilants points

Municipale ardeur à maîtriser le noir

Les réverbères veillent sur les amoureux

Sur les poivrots sur les trottoirs

Sur la solitude insondable de Paris

 

Ça ne bouge pas ça reste là

Les chiens y pissent et les oxydent

Obstinément ça vous jalonne les trottoirs 

Le jour ça ne sert à rien

En haut des escaliers de Montmartre

Pourtant pourtant un réverbère a fait Paris

Partager cet article
Repost0
Published by herveig
5 juin 2016 7 05 /06 /juin /2016 15:35

Mer de gris, de brun pâle, le fleuve

Paresseux, indolent s'étale et gonfle et prend.

De rues de quais d’avenues et de squares plus.

L’informe catastrophe s'infiltre, s’immisce, s'introduit et conquiert.

De gris et de brun pâle la ville est assaillie.

Et ça roule et ça fend, ça déferle et ça noie.

Le fleuve est étale et est fort pourtant.

L’aval, l'aval, l'aval, inévitablement.

Vers l'aval les eaux brunes et grises attaquent les piles des ponts et engorgent leurs arches.

Vers l'aval l'horizontale fureur.

Vers l'aval la froide obsession.

Le ciel est bas

Le fleuve est haut

Qui se rejoignent.

La ville est ridicule et elle n'existe plus.

Un panneau blanc, un panneau jaune,

Sur un quai inondé

Émergent.

Partager cet article
Repost0
Published by herveig
6 avril 2016 3 06 /04 /avril /2016 19:44

Et regardez la ville dans sa langueur vaste.
Voyez y échouer les passions attiédies.
Bientôt vous comprendrez ce que disait la brume.
Qui dévore à pas lents les horizons des hommes,
Ces vies qui s’évaporent dans l'air irrespirable.
La ville ne dit rien et elle englobe tout.
Voyez-la étaler sans un bruit ses distances.
Sentez le poids de l'air que personne ne hume
Sans la peur et le doute.

La ville va te prendre, méfie-toi, étourdi.
Tu crois la contempler, déjà ta vue s'affaisse.
Vois dans le soir qui dure sous un soleil pâle,
Vois juillet qui s'achève au coin d'un trottoir nu.
L'avenue aveuglante n'a ni début ni fin.
Abasourdi tais-toi, et comprends si tu peux.

Partager cet article
Repost0
Published by herveig
20 février 2016 6 20 /02 /février /2016 15:03

Les indicibles choses constellaient l'horizon. Le ciel et le sol gris s’épousaient en une brume sèche. La ville, sans immeuble et sans rue, grouillait d'absence.

Et le chemin de fer menait un train sans fin. Ses rails avaient du mal à rester parallèles. Sur des tronçons entiers ils faisaient même défaut, et on voyait alors dans un souffle léger le train qui s'élevait imaginant sa voie.

On arrivait enfin dans la gare absolue, dans la gare véritable. Et de fonte et de fer, de vapeur et de bruit. C'était un festival, c'était une merveille. Les trains s'y arrêtaient à l’occasion, intimidés, tremblants. Et d'autres n'osaient pas. On les voyait s'enfoncer dans le sable meuble, gros vers du désert farouches et susceptibles. Ils rejaillissaient parfois un peu plus loin, laissant leurs voyageurs ravis de l'aventure, descendre sur un quai qui n'en n'avait pas l'air.

On les voyait passer en lents convois rêveurs, regagner à pas lents cette nouvelle ville que le train apeuré n’avait pu desservir

Ô la ville magnifique que c'était. Une ville de songe aux avenues étales. On voyait sur la gauche, quand on regardait bien, la masse grise et sombre magistrale et terrible du musée de la Science et des Arts réunis où personne n’entrait sans une appréhension.

On traversait des places aux vastes proportions bordées par l'horizon. Et souvent l'on mourait sans atteindre l'autre rive de faim ou de vieillesse, tant elles étaient immenses.

Vos enfants, ou vos petits-enfants arrivaient quelquefois à atteindre la mer. Le jardin de l'Empereur épousait la corniche. Et ils se promenaient à l'ombre squelettique des plantes mystérieuses qu'on ne comprenait pas.

Et on voyait le port, cette étendue de gris sur cette mer sans eau. Les bateaux qui ne voguaient jamais étalaient leurs inutiles voiles sur le ciel sans vent.

Les yeux incrédules et sans savoir pourquoi, on s'accoudait des siècles sur la rambarde longue.

Partager cet article
Repost0
Published by herveig

Présentation

Recherche

Liens